La consultation du CSE est obligatoire avant l’introduction de l’IA
C’est ce que vient de rappeler le tribunal de Nanterre (14 février 2025) à une entreprise qui avait commencé la mise en place d’un projet d’IA sans informer ni consulter le CSE alors que l’article L2312-8 du code du travail précise que son information et sa consultation sont obligatoires sur les questions touchant l’organisation, la gestion et la marche de l’entreprise notamment pour l’introduction de nouvelles technologies, et ce avant la concrétisation du projet. Il a donc exigé que l’entreprise suspende le déploiement de son projet d’IA jusqu’à l’achèvement de la consultation du CSE, en particulier l’examen des questions de santé, sécurité et organisation du travail, sous astreinte, ainsi que le versement de dommages et intérêts au CSE.
Cette décision judiciaire montre bien la vigilance nécessaire des membres du CSE afin que leurs prérogatives soient respectées.
Dial IA, un outil pour un usage social au service des bons usages de l’IA, s’appuyant sur le dialogue social
Il est le résultat d’un travail de 18 mois entre syndicats (Cfdt, Ugict-Cgt, CGC, FO cadres), entreprises, administrations, experts et chercheurs, coordonné par l’Ires (Institut de recherches économiques et sociales), soutenu par Ultra Laborans et cofinancé par l’Anact (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail). Il a abouti à un manifeste [1] et à un webdoc [2] .
Partant du principe que l’intelligence artificielle n’est pas intelligente mais dépend du facteur humain pour l’élaboration des algorithmes et l’alimentation en données, Dial IA montre les enjeux, les différentes situations de développement de l’IA et l’appui nécessaire sur le dialogue social.
Les enjeux sont de nature différente. Ils concernent :
- le travail, pour maitriser les risques spécifiques des managers pour la bonne mise en place sans dégâts, de piratage des données personnelles, de remise en cause de métiers, de perte d’expertise, de RPS, de plans sociaux, ou de réponses aberrantes.
- l’environnement, par la consommation d’énergie, de minerais et d’eau qu’elle engendre et les déchets électroniques créés.
- la politique et la gouvernance de l’entreprise, avec le risque de dépendance aux fournisseurs et experts.
- le respect de la réglementation, en particulier européenne (RGPD, directive pour l’amélioration des conditions de travail via des plateformes, AI Act).
- les données.
- les impacts sur l’organisation du travail.
Trois grands types de situations de développement de l’IA sont identifiés, en choisissant une approche, en amont, basée sur la façon dont les acteurs de l’entreprise ou de l’administration déterminent, élaborent et organisent les différentes étapes de cette introduction plutôt qu’en aval par l’impact de la technologie sur l’organisation. Des schémas en facilitent le décodage (https://dial-ia.fr/modalites-du-dialogue-social/leviers-d-action). Ceci selon que l’entreprise ou administration :
- conçoit, développe, exploite elle-même son système d’IA ;
- l’achète « sur étagère » ;
- ou l’achète avec une adaptation à ses besoins spécifiques.
Cette introduction, pour qu’elle se passe bien, a intérêt à être préparée en en parlant collectivement. Le premier objectif, face à la méconnaissance, est de mettre à niveau d’information et accompagner tous les acteurs de l’entreprise qui pour beaucoup ne maitrisent pas cet outil, afin d’éviter les peurs et méfiances que l’IA engendre et d’apporter les compétences nécessaires. C’est aussi de permettre aux différentes générations de travailler ensemble en bonne intelligence. Le travail amont en commun peut permettre au projet d’aboutir (1 sur 2 seulement aboutit), voire de minimiser les coûts. D’autant plus que pour l’entreprise c’est un enjeu d’attractivité, en particulier pour embaucher des jeunes qui, eux, la pratiquent déjà.
Le dialogue social en est un atout essentiel au niveau de l’entreprise et de l’administration, mais le projet incite aussi à un dialogue social interprofessionnel.
Aussi Dial IA propose dans le manifeste des outils et leviers d’action pour faciliter la prise en charge et la consultation et négociation de l’introduction de l’IA par les élus du personnel et les représentants syndicaux. Un outil dont il ne faut pas se priver pour réussir à peser sur les choix qu’il est nécessaire de faire au fur et à mesure des étapes de mise en place de l’IA.
Sources